Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Energie potentielle d'écriture

Energie potentielle d'écriture

Ecrire sur les sciences pour échanger une énergie et de la curiosité.


Le physicalisme : comment la science ne voit le monde qu'objectivement

Publié par Elsa sur 17 Juin 2014, 17:01pm

Catégories : #Philosophie des sciences

Souvent, lorsqu'il s'agit de parler de l'approche scientifique d'un phénomène, nous utilisons des mots tels que « rationnel », « cartésien », « logique », etc. Quelle philosophie se cache derrière ces mots ? Si tous les scientifiques ne devaient voir le monde que d'une seule manière, quelle serait-elle ?

 

Le travail de recherche en sciences naturelles ou physiques est le fruit de consensus sur certaines règles de travail et définitions de concepts et d'objets qui permettent à l'ensemble des chercheurs de travailler ensemble de façon cohérente : ils forment ce que nous appelons la communauté scientifique. Autrement dit, les scientifiques travaillent en faisant sans cesse des compromis métaphysiques et méthodologiques. Il y aurait donc une philosophie de la pratique scientifique : quelle est-elle ?

 

Selon un courant de pensée né dans les années 1930 à Vienne et nommé le néopositivisme (ou positivisme logique), l'ensemble de la pratique scientifique devrait se faire en calquant la méthode utilisée en physique. C'est ce que l'on appelle le physicalisme. Le physicalisme est une thèse philosophique selon laquelle un résultat scientifique ne doit s'exprimer qu'en termes relatifs aux sciences exactes et naturelles et ne faire référence qu'à des objets physiques et à un ensemble de faits observables, en utilisant un langage unique, logique, applicable à tous et contrôlable par tous. L'ensemble des sciences (incluant les sciences humaines et sociales) sont alors soumises à la méthodologie des sciences physiques.

 

Selon la définition de l'Académie Française (9e édition), le physicalisme est une « doctrine néopositiviste affirmant que toute réalité peut être réduite à des phénomènes physiques, et que, de ce fait, la physique assure, sur le plan tant du langage que de la méthode, l'unité de toutes les sciences, y compris les sciences humaines ».

 

En résumé, autant la vision du monde que la méthodologie et le langage utilisé pour exprimer les résultats sont unifiés, indifférenciés pour toutes les sciences. C'est une vision réductionniste des choses : toutes les sciences sont réduites à la physique, qui elle permettrait de tout expliquer. Au niveau des trois éléments précédemment cités (vision du monde, méthodologie et langage), on considère selon le physicalisme qu'un psychologue doit pratiquer exactement de la même manière qu'un physicien. Par conséquent, dans le cadre d'une pratique physicaliste des sciences, toute subjectivité est niée : autant celle du scientifique que celle de ce qu'il étudie, dans le cas des sciences étudiant un être conscient. C'est une doctrine objectiviste : seul existe l'objet (dépourvu de toute subjectivité et de toute conscience). Mais si tout est objet, comment envisager chaque être humain en tant qu'individu conscient et en tant que sujet ?

 

 

Nous saisissons ici la principale objection faite au physicalisme : son incapacité à expliquer la subjectivité. Notre objectif sera de réfléchir ensemble sur les implications d'une vision physicaliste du monde en sciences. Je compte construire une discussion plus large que ce qui peut être entrevu simplement avec cet article en commençant par écrire prochainement un article sur une des critiques constructives possibles du physicalisme et à terme un autre sur la difficulté de l'articulation entre sciences humaines et sciences naturelles à travers l'exemple de la psychologie et de la psychanalyse. Pour ce dernier, tous les témoignages ou réflexions sont les bienvenues en amont car je n'étudie ni la psychanalyse ni la psychologie, je vais donc avoir besoin de nombreuses lectures pour nourrir ma réflexion.

 

 

Pour terminer, je pense qu'a court terme une certaine approche physicaliste a sa place en sciences notamment puisque certaines théories physico-chimiques sont utilisées dans des disciplines à la frontière des sciences expérimentales et des sciences humaines (par exemple les neurosciences), mais que cette approche ne doit pas se suffire à elle-même. Selon moi, le physicalisme peut être bénéfique s'il n'est qu'une hypothèse de travail : le scientifique fait alors « comme s'il » n'existait que la composante physique du monde. C'est alors un physicalisme méthodologique et non une thèse ontologique dans le sens où le scientifique ne pense alors pas forcément que seule la réalité spacio-temporelle existe, où il ne rejette pas systématiquement toute métaphysique (ce qui est le cas dans le physicalisme ontologique dont nous venons de parler).  

Schéma du fonctionnement de la glande pinéale vue par Descartes dans les Méditations métaphysiques (1641), glande où se rencontraient selon lui le corps et l'esprit.

Schéma du fonctionnement de la glande pinéale vue par Descartes dans les Méditations métaphysiques (1641), glande où se rencontraient selon lui le corps et l'esprit.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Nous sommes sociaux !

Articles récents